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Si le paiement préalable n’est plus une condition de recevabilité de la requête devant la Commission du Contentieux du Stationnement Payant, le recours introduit n’est pas pour autant suspensif !

Le stationnement payant sur voirie devient une problématique aussi quotidienne que pénible, voire irritante, pour les automobilistes qui circulent dans les centres urbains et périphériques. Ces difficultés semblent encore plus prégnantes depuis l’entrée en vigueur, le 1er juillet 2018, de la réforme opérée par la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014, de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles dite « Loi MAPTAM ».

L’objectif poursuivi par cette réforme était de procéder à une dépénalisation du stationnement payant sur voirie pour y substituer une logique de gestion domaniale.

 

La pénalisation en vigueur jusqu’alors présentait plusieurs inconvénients constatés tant par les différents acteurs du secteur que par les juridictions financières :

  • La sanction encourue était insuffisamment dissuasive (contravention de 2ème classe (montant de 11 euros) recouvrée selon les modalités applicables aux amendes forfaitaires). Cela conduisait les usagers à faire preuve de rationalité économique, préférant souvent régler le montant de la contravention (potentielle) que le montant des droits de stationnement requis, surtout dans les zones où les emplacements étaient rares et ces mêmes droits élevés,
  • Sanction pénale, celle-ci était identique sur tout le territoire national, sans distinction de la zone géographique ni des caractéristiques locales de la circulation,
  • Les collectivités territoriales ne pouvaient surveiller en permanence la voie publique et étaient d’autant moins incitées à le faire tout comme à verbaliser les contrevenants qu’elles ne bénéficiaient in fine que d’une fraction minimale du produit des contraventions, compte tenu d’un système financier de redistribution jugé opaque.

Depuis le 1er juillet 2018, les droits réglés par l’usager pour le stationnement de son véhicule sur voirie constituent une redevance domaniale dont le montant est déterminé par l’assemblée délibérante de la collectivité territoriale gestionnaire de la voirie, tout comme celui du Forfait de Post-Stationnement (« le FPS »), évaluation forfaitaire du montant de la redevance due par l’usager en cas d’absence ou d’insuffisance de règlement par lui : Le FPS se trouve désormais substitué à la contravention antérieurement en vigueur.

Dans l’hypothèse où l’usager n’aurait pu / voulu régler le montant du FPS dans un délai de trois mois, il reçoit alors de la part de l’Agence Nationale de Traitement Automatisé des Infractions, un titre exécutoire comportant une majoration d’un montant minimal de 50 euros, avant que des mesures de recouvrement d’office ne soient mises en œuvre par la Direction Générale des Finances Publiques à son encontre.

Souhaitant pouvoir concilier le droit au recours effectif avec le principe de bonne administration de la justice, le législateur a entendu permettre à l’usager de contester les FPS et titres exécutoires portant montant majoré émis par les collectivités territoriales ou les tiers contractants. Les recours doivent être portés devant la Commission du Contentieux du Stationnement Payant (« la CCSP »), juridiction administrative spécialisée exclusivement compétente pour connaître des recours dirigés contre un FPS ou un titre exécutoire majoré (v. par ex : TA Paris, 03 Novembre 2022, n° 2219378). Si la CCSP peut être saisie directement d’un recours dirigé contre un titre exécutoire majoré, l’usager doit d’abord former un recours administratif préalable obligatoire lorsqu’il entend contester un FPS.

Initialement, la recevabilité de la requête déposée devant la CCSP était subordonnée au règlement préalable, par l’usager, de la somme indiquée par le FPS ou par le titre exécutoire portant montant majoré. Une telle obligation a été censurée par le conseil constitutionnel (Cons. constit., 9 septembre 2020, n° 2020-855 QPC), ce dernier estimant que le législateur avait porté une atteinte substantielle au droit au recours effectif en ne prévoyant aucune dérogation à cette obligation de paiement préalable (V. Mazzocchi, « Sur le Forfait de Post-Stationnement : Conséquences pratiques d’un manque de rigueur juridique », Droit Administratif, n° 12, décembre 2020).

Pourtant, il convient de ne pas se méprendre sur la portée d’une telle censure. Cette déclaration d’inconstitutionnalité n’implique aucune remise en cause du principe de droit commun applicable devant les juridictions administratives : Les recours ne produisent en principe aucun effet suspensif, y compris lorsqu’ils sont dirigés, contre un ou plusieurs titres exécutoires.

Dès lors, si le règlement du montant du FPS ou du titre exécutoire portant montant majoré par l’usager ne constitue juridiquement plus une condition de recevabilité de la requête, il ne peut être conseillé que d’en régler le produit, fût-ce à titre conservatoire et quitte à réclamer, en cas de décharge prononcée par la CCSP, le versement des intérêts au taux légal dus depuis l’introduction de la requête ou l’indemnisation du préjudice subi. A défaut, et bien que l’usager ait régulièrement saisi la CCSP, le processus de recouvrement continuera de produire ses effets (émission d’un titre exécutoire portant montant majoré, opposition administrative, saisie administrative…) jusqu’à complète exécution du FPS, exécution qui se produit parfois bien avant l’intervention de la décision rendue par la CCSP, compte tenu des délais de jugements, lesquels tendent toutefois à se réduire.

Poursuivant une entreprise de limitation des recours par les usagers, l’on comprend pourquoi le Gouvernement n’est pas pressé, en dépit de propositions parlementaires en ce sens, de corriger ce point (Le député Daniel Labaronne avait proposé, dans le cadre du projet de loi « 3DS » et par amendement, de réintroduire l’obligation de paiement préalable en l’assortissant de dérogations. Cet amendement a été, compte tenu des règles de la procédure parlementaire, jugé irrecevable).

On ne peut dès lors que déplorer cette absence d’effet suspensif du recours introduit, qui, combiné aux délais de jugements relativement longs de la CCSP conduisent en pratique à réinstaurer cette obligation de paiement préalable tout en augmentant, pour la juridiction, le volume de recours à traiter alors que l’usager, souvent peu au courant des règles applicables, se trouve confronté à une augmentation des sommes à régler.

Si Louis XI avait coutume de considérer qu’en matière d’administration, toutes les réformes sont odieuses, cet aphorisme ne pourrait mieux décrire la réforme du stationnement payant sur voirie, tant le système mis en place par les pouvoirs publics s’avère peu lisible pour le citoyen, défavorable pour les usagers, et noie les collectivités comme les magistrats de la CCSP sous un volume de requêtes en constante augmentation qu’il leur est bien difficile d’absorber (150 000 à 160 000 nouvelles requêtes enregistrées chaque année) !

Que vous soyez usager, requérant ou collectivité, n’hésitez pas à vous faire accompagner par un conseil juridique, lequel trouvera la solution optimale aux problèmes rencontrés !

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